TSI - Télévision suisse italienne
Selon les estimations les plus récentes un million d'hommes jeunes, appelés liquidateurs, en provenance de toute l'URSS ont été jetés contre le réacteur explosé pour: a) éteindre l'incendie qui a duré 10 jours; b) enfermer dans un “sarcophage”, improvisé dans des conditions de radioactivité terrifiantes, un reste de 200 tonnes de combustible nucléaire fondu, figé comme une lave et éparpillé dans un labyrinthe surréel de ruines de béton et d'acier tordu; c) “nettoyer” les territoires pollués, c'est à dire les champs, les routes, les maisons des villages, les espaces indéfinis des pluies radioactives… Le Tonneau des Danaïdes, l'absurde, le temps saturnien de la mythologie antique…
Ces suppliciés, exposés à ces radiations terrifiantes officiellement non reconnues, sont malades. Des milliers d'entre eux sont morts et continuent de mourir. Malgré leur sacrifice, qui en éteignant le volcan nous a évité le pire, 15 ans après la catastrophe la situation s'aggrave de jour en jour. En Russie, Ukraine et Biélorussie des millions de personnes vivent dans des territoires contaminés et mangent des aliments radioactifs, victimes des radionucléides, de l'indifférence du monde et de la désinformation. Afin de ne pas compromettre la crédibilité et les intérêts de l'industrie nucléaire, les institutions préposées à la sécurité haussent “les normes des doses admissibles en cas d'accident”, réduisant ainsi les coûts de Tchernobyl et ceux des “accidents à venir”. L'Agence Internationale de l'Énergie Atomique (AIEA) et l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) ne reconnaissent pas le lien entre les radiations et les maladies, tandis que le nombre des victimes croît et l'on craint pour les générations futures à cause de lésions irréparables au patrimoine génétique. Les maladies sont innombrables, surtout chez les enfants dont les organismes “vieillissent” à cause d'une sorte de SIDA nucléaire.
La Biélorussie est le pays des forêts et des bois, des étangs, des cours d'eau et des rivières. Mais 26% des forêts et plus de la moitié des prés le long des fleuves Pripiat', Dniepr, Sozh appartiennent à la zone polluée radioactive…
L'équipe de la TSI a parcouru l'Ukraine et la Biélorussie en '91 et en '99. Elle a rencontré une humanité abandonnée dans un malheur qui n'a pas de nom: des femmes, des hommes, des enfants, des scientifiques repentis, des liquidateurs, des médecins. Elle a écouté la tragédie silencieuse de ces gens pris au piège dans des territoires maudits et splendides de beauté, où il est dangereux de se promener, de pêcher, de cueillir des baies et des champignons. Où on tombe malade et on meurt mal seulement parce qu'on mange, parce que l'indifférence et l'avarice du monde lésinent les moyens suffisants pour sauver ces humains.
Pour continuer à purifier et à protéger contre les radionucléides l'organisme d'un enfant qui s'en est partiellement libéré lors d'un séjour à l'étranger, il suffit d'une somme d'env. 300 francs français par an: c'est le coût d'un adsorbant efficace des métaux lourds à base de pectine. Mais la pectine seule ne suffit pas. Le séjour à l'étranger est nécessaire, mais pas suffisant. En combinant les deux méthodes, il est possible de tenir l'enfant hors du danger de lésions graves à l'organisme par contamination. Les enfants pris au piège sont 500 mille, ce qui fait 150 millions de francs. Cet argent n'existe pas.
Le coût de deux journées de guerre des pays riches contre Belgrade (2,4 milliards, estimation de la banque américaine Merryl Lynch) couvrirait 15 ans de soins. L'argent existe pour tuer, pas pour faire vivre.
Deux documentaires de Wladimir Tchertkoff pour la télévision suisse de langue italienne. Images Romano Cavazzoni, son Nino Maranesi, montage Emanuela Andreoli.