La question que nous nous posions ce matin - comment la pectine peut-elle être considérée et comment doit-on agir à l’avenir, apparaît définitivement comme un facteur de division : cette réunion vient de le montrer tout à fait clairement. Même si les éléments de consensus sont extrêmement faibles, je pense qu’ils méritent tout de même d’être rassemblés et appréciés.
Mais avant de le faire, je voudrais d’abord vous faire part de mon sentiment et de mes craintes sur le déroulement de cette réunion, qui, dans mon esprit, était faite pour fermer des plaies et non pas pour en rouvrir. J’ai entendu aujourd’hui s’opposer, de manière extrêmement classique, deux approches des problèmes de Tchernobyl. L’une est strictement scientifique, l’autre part du point de vue de la santé publique. Si les échanges ont été parfois vifs, je ne voudrais pas qu’ils soient destructeurs. Les deux approches, c’est en tout cas ma conviction intime, doivent être combinées et ne pas s’opposer. Mesdames, messieurs, même dans ce qui a été dit avec véhémence, tout le monde ici possède une part de vérité. Le point de vue de personnes qui abordent ces problèmes dans une perspective de prévention, en travaillant dans un laboratoire et sans être directement confrontées à ces problèmes ne peut qu’être différent de celui de personnes pour qui cette contamination est un problème social, un problème de santé, un problème d’éthique et même, pour certains pays, un problème de survie extrêmement grave. Donc je vous appelle non pas à regretter ou à camper sur la véhémence de vos propos mais à la considérer comme inévitable et, d’une certaine manière, saine.
Maintenant voyons sur quoi nous pourrions nous rassembler. Personne autour de cette table ne dit que la pectine n’a aucune espèce d’effet. Elle en a pour certains très peu, pour d’autres beaucoup ; mais personne, je crois, ne soutient qu’elle n’en a strictement aucun. A partir de là, il me semble qu’il serait indigne, et probablement mal approprié, de faire une impasse totale sur l’utilisation de la pectine. S’il y a une chance, aussi faible qu’elle soit, qu’elle aide les enfants à sortir de l’état dans lequel ils sont, cette chance mérite d’être courue. Et c’est pour cela qu’il me semble aussi que nous pourrions nous entendre sur le fait qu’il faut continuer un certain nombre de recherches sur la pectine, de façon à voir dans quelles circonstances, avec quels effets, avec quelle efficacité elle peut être utilisée. Il me semble que cela serait un terrain de collaboration extrêmement intéressant compte tenu de la pluralité des approches et des expériences qui sont autour de cette table, et que nous pourrions comme suite logique définir un protocole expérimental qui serait appliqué par chacun selon sa manière et dans son secteur d’activités, de façon à ne stopper aucune des activités relatives à la pectine qui sont en cours aujourd’hui.
Et pour terminer, puisqu’il est nécessaire de rendre un avis au Comité d’Approbation de Core demain, je serais personnellement enclin, sachant que nous ne sommes pas arrivés à des conclusions définitives, à rapporter d’une part que nous allons travailler ensemble d’avantage pour aller plus loin, pour savoir exactement ce que l’on peut dire, mais d’autre part, compte tenu du principe de précaution, qu’il ne conviendrait pas à mon sens de bloquer des projets comme celui du professeur Nesterenko, tout simplement parce que ce projet pourrait être aménagé de façon à être mené suivant un protocole international, reconnu par tous autour de cette table, et ferait donc ainsi partie de la suite de nos expériences. Voilà ce que personnellement je souhaiterais pouvoir dire à Core demain.